S- Structure, similarité, syndèse, système

Structure


La structure n'est pas un ensemble de relations entre des éléments: ceux-ci procèdent de l'illusion de substance introduite par les marques "concrètes" d'un système abstrait où n'existent que des relations. Relations qui ne se limitent pas à de la différence par laquelle des identités apparaissent: la segmentation les constitue dans le même temps en unités. Ces formes propres à l'instance technique formalisent aussi la production qui n'est pas moins structurée que la fabrication par la re-structuration qu'elle apporte dialectiquement.

 

Similarité

Pour passer en compréhension de la structure à la notion de complémentarité et de similarité il faut supposer que deux ensembles de relations par différenciation et segmentation s'articulent. La  similarité désigne de l'unité partielle organisant techniquement des choix entre des entités relativement identiques: classe d'engins partageant le même matériau (covalence) ou classe de machines s'organisant autour d'une même tâche (type de machine).

Structure, structuration ... et vaisselle

 

(La technique et l'action font ici l'objet d'un dialogue)

 

  • Qui dit structuration suppose l'absence initiale de structure ?

On pourrait le penser, mais c'est pour dire que la structure n'est jamais définitive et qu'elle rencontre l'action qui impose une autre conduite.

  • Est-ce à dire que l'action n'est pas elle-même structurée ?

Nous y sommes : la structure est à chaque instant confrontée à une chose à faire dont la singularité exige qu'on réaménage la structure existante.

  • C'est pourtant la structure existante qui a organisé l'affaire qu'on a entreprise ; sans elle, ton chantier pourrait-il avoir lieu ?

Donne moi un exemple.

  • Voilà : si je dis que j'ai à faire la vaisselle, ce soir, sans attendre demain matin, c'est que je ne dispose pas de lave-vaisselle qui me permettrait de laver automatiquement le tout en un tour de main. Le lave vaisselle ou l'absence de lave vaisselle font la vie de tous les jours.

Je te suis : si tu attends, les déchets sèchent et collent aux surfaces à nettoyer, il est donc plus facile, en un sens de faire la vaisselle tout de suite lorsqu'on n'a pas d'équipement.

  • Nous sommes d'accord. Et dans cet exemple on se rend compte que l'absence de machine à laver n'équivaut pas à l'absence totale d'appareil : il y a de l'eau froide et chaude, du liquide lave-vaisselle, un évier, un bac pour y tremper la vaisselle et un égouttoir et plus.

Maintenant, il faut considérer la structure en place dans cet atelier de cuisine avec toutes les manoeuvres qu'elle impose et toutes les possibilités qu 'elle propose.

  • J'attends que tu me dises comment tu envisages la structuration.

D'abord la structure, sinon on s'embrouille...Si l'on a mangé gras, on est obligé de faire avec c'est à dire d'employer un détergent. Voilà deux matériaux, pouvoir de viscosité de la graisse et pouvoir de dissolvant de la lessive avec lesquels on doit composer.

  • L'eau chaude permet de se débarrasser des graisses, surtout si elles sont végétales. Entre parenthèse, si l'on mange avec des graisses insaturées, on peut se dispenser de lessive.

Voyons quelle manœuvre impose le recours à la lessive et le cas contraire où on s'en passe. À supposer que je dispose de deux bacs, un pour l'eau de dégraissage et un autre pour l'eau de rinçage.

  • On voit le côté très organisé du plongeur ou de la ménagère : quant à moi, je fais avec un seul évier et j'utilise la lessive ponctuellement lorsque c'est nécessaire : une goutte sur le plat d'une assiette et ça suffit !

Je vois, je procède pour ma part systématiquement : tout est plongé dans le bac rempli d'eau avec de la lessive et je ne fais pas de distinction entre ce qui est relativement propre et le reste.

  • Bien, j'ai donc plutôt tendance à la structuration sur place en fonction du travail à faire, tel qu'il se présente....

...Tandis que moi je procède par négligence avec la facilité offerte par mon bac de lavage.

  • OK, mais tu es obligé d'avoir un bac de rinçage.

Est-ce que tu ne gaspilles pas l'eau en la laissant filer dans l'égout ?

  • J'ai l'impression qu'on s'éloigne du propos qui était de savoir quelle structure imposait une structuration. Mais je retiens de ce que nous venons de dire que nous avons deux conduites opposées : l'une plutôt techniquement confortable et l'autre attentive à chaque geste nécessité par la chose à faire telle quelle.

C'est juste, on a parlé des matériaux, mais quelle conduite imposent les ustensiles ?

 

Le système

Le système promeut un type de conduite tel que tout va se faire à partir du matériau, de l'engin, de la tâche ou de la machine mis à disposition. Ceci veut dire que le constructeur sera induit à opérer davantage ou moins qu'il n'est nécessaire pour produire la chose à faire et autrement.

La syndèse

La syndèse correspond à cette capacité à réaménager les machines pour leur enchaînement.Il ne s'agit pas tant de faire une sculpture qui puisse passer par la porte que de mobiliser des complémentarités installées dans nos équipements et nos conduites: ainsi au théatre et au travail, l'ampleur des déplacements s'organise d'avance en fonction de l'installation qui les accueille et vice versa comme le moteur et le carènage de l'automobile réciproquement se transforment.

Il en résulte une conduite d'anticipation et de rétrospection.

 

Polytélie et « tant qu'à faire »

 

La polytélie désigne cette fausse pluralité de fins inhérente à la machine, pluralité étendue à ses constituants solidarisés en unités. En nous référant à l'analyse de René Jongen, peut-on dire que la mise en action d'une machine implique que le constructeur fait plusieurs choses puisque les partiels de fins intégrées font faire ceci et cela pour finalement parvenir à ne faire qu'une seule chose ?

La confusion provient du vocable chose, à sens différents...

Revenons sur une explication fournie par l'observation clinique d'un agraphique par Attie et Hubert qui postulent une perte de syndèse.

L'exemple porte sur une activité de menuiserie proposée à quelqu'un qui présente des troubles de la manipulation. Ce qui apparaît dans ce test c'est la capacité ordinaire que nous avons tous en tant que technicien à gérer deux actions par la même machine ; et nous disons pour la désigner : « tant qu'à faire ». Le traçage le crayon en main peut servir à préparer le sciage comme l'assemblage qui va suivre : les deux actions à gérer sont d'indiquer des longueurs par des petits traits droits perpendiculaires au bord de la planche et des traits en oblique pour l'orientation de la coupe d'onglet.

Comment peut-on confondre les deux tracés qui s'en suivent ? On peut théoriquement se tromper quant à l'orientation du sciage et scier droit par prise en compte du trait perpendiculaire au lieu du trait oblique. Mais le réglage œuvre pour nous car aucun trait droit ne peut être fait dès lors que la coupe est réglée pour des obliques. On ne peut se tromper que si on procède sans scie radiale ni boîte à onglets, en « oubliant » ce pour quoi on scie, induit par un trait. Comment cette erreur peut-elle arriver ? Parce que c'est possible. « Qui chante au sciage déchante au montage », proverbe de menuisier. Le pouvoir du technicien le met en loisir et il est dès lors à son poste dans un rapport de facilité au travail. L'assurance gagnée est perdue en inattention ; il faut la vigilance de l'instrument pour parvenir au fonctionnement adéquat.

C'est parvenu à ce point qu'on mesure combien la distinction entre la machine et l 'appareillage est pertinente. Il y a le sciage et le bois à scier, l'assemblage et la planche à assembler, un écart est à prendre en compte comblé par une attention qui vient par un contrôle ponctuel au secours du technicien qui est agi par la machine.

Toute action réduit l'outillage au matériel et au minimum : il y a la chose et ce qu'on en fait, entendons par là le moyen et la fin. C'est l'ensemble technique des moyens et des fins élaborées qui se trouve alors considérer comme moyen dans le provisoire de l'action, pour retrouver ensuite leur statut de disponible pour agir une fois désinvestis.

La césure préfactuelle (ou préfactive) transpose en art la coupe prédicative du langage. Elle se rapporte autant à la syndèse et à l'enchaînement des machines du chantier qu'à la constitution des unités de machines. L'interchangeabilité des appareillages qui implique la possibilité du remplacement d'une machine par une autre qui fera la même affaire, ni plus ni moins, n'est pas la mise en dépendance par la technique de la chose à faire avec la façon de s'y prendre. Un trait de scie supprime 1 ou 2 mm selon la scie qu'on utilise, le traçage préalable l'anticipe. Et cette anticipation de l'espace perdu nécessairement qui est technique ; quant à l'attention, elle porte sur le fait qu'untel mesurera l'épaisseur de la lame jusqu'à éventuellement recourir au pied à coulisse tandis que l'autre se contentera d'un standard.

 

 

Outinstr

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